ChatGPT, Gemini, Copilot, Perplexity, Claude… Que ce soit pour un usage personnel ou professionnel, tout le monde a désormais son ou ses IA de prédilection. Des centaines de solutions dopées à l’intelligence artificielle promettent des gains de productivité spectaculaires, mais cette révolution a un carburant indispensable : la donnée. Et bien souvent, il s’agit de données personnelles.
Pour les entreprises, l’équation devient complexe en matière de sécurité et de conformité réglementaire. Comment exploiter la pleine puissance de l’IA tout en maîtrisant les risques ?
Car derrière l’efficacité apparente se cachent des menaces majeures, souvent sous-estimées. Ignorer la relation critique entre IA et données personnelles, c’est s’exposer à des failles de sécurité, de lourdes sanctions au niveau du RGPD, une perte de confiance de la part de vos clients et collaborateurs, et des décisions biaisées aux conséquences désastreuses.
Cet article identifie 5 de ces risques concrets et vous donne les clés actionnables pour les maîtriser.
Innover, oui, il ne faut pas freiner mais maîtriser en toute sécurité et conformité.
Risque 1 : La fuite de données sensibles via les prompts des employés
C’est peut-être le risque le plus immédiat et le plus répandu. Dans un souci de productivité, un employé est tenté de copier-coller des informations confidentielles ou des données personnelles directement dans l’interface d’une IA publique (comme la version gratuite de ChatGPT).
Le problème concret : Ces données quittent instantanément le périmètre de sécurité de l’entreprise. Pire, les conditions générales d’utilisation de nombreuses IA publiques stipulent que les conversations peuvent être utilisées pour entraîner leurs futurs modèles. Un extrait de contrat, une liste de clients avec leurs commentaires, un bout de code sensible ou des informations RH pourraient ainsi se retrouver « aspirés » et potentiellement réutilisés.
Le « copier-coller » qui peut coûter cher
Exemple concret : Un responsable RH, voulant préparer une réunion, copie-colle un tableau contenant les noms, postes, salaires actuels et propositions d’augmentation d’une dizaine de collaborateurs dans une IA pour lui demander de « créer une présentation PowerPoint ». Ces données de rémunération, parmi les plus sensibles de l’entreprise, sont désormais dans la nature.
Comment maîtriser ce risque ?
- Établissez une politique d’utilisation claire : Interdisez formellement le « copier-coller » de toute donnée personnelle, confidentielle ou stratégique dans des IA publiques.
- Formez, formez et formez encore : Sensibilisez vos collaborateurs aux dangers de cette pratique. Expliquez-leur ce qu’est une donnée personnelle et pourquoi elle ne doit jamais être exposée.
- Privilégiez les solutions d’entreprise : Déployez des solutions d’IA « privées » (On-Premise ou dans un cloud sécurisé) qui garantissent que vos données restent cloisonnées et ne sont pas utilisées pour l’entraînement de modèles globaux.
- Pseudonymisez avant d’analyser : Même dans un environnement sécurisé, la pseudonymisation est une excellente pratique. Des outils comme Datanaos peuvent remplacer les noms par des identifiants, masquer les salaires tout en conservant leur distribution statistique, etc. L’analyse reste pertinente, mais le risque de ré-identification en cas de fuite est drastiquement réduit.
Risque 2 : La collecte et l’utilisation non conformes des données
Les modèles d’IA, en particulier les modèles d’apprentissage automatique (Machine Learning), sont incroyablement gourmands en données. Pour « apprendre », ils doivent analyser des volumes massifs d’informations. La tentation est grande pour une entreprise de « nourrir » un algorithme avec toutes les données dont elle dispose, sans se poser de questions.
Le problème concret : Utiliser des données personnelles pour entraîner ou interroger une IA constitue un traitement de données au sens du RGPD. Ce traitement doit reposer sur une base légale valide (consentement, intérêt légitime, obligation contractuelle, etc.), comme l’exige l’Article 6 du RGPD. Entraîner une IA de recrutement sur une base de CV collectés depuis 10 ans, sans avoir vérifié si le consentement initial des candidats couvrait ce type d’analyse algorithmique, est une violation directe du règlement. De plus, le principe de minimisation (Article 5.1.c du RGPD) est souvent bafoué : l’IA a-t-elle vraiment besoin de connaître l’adresse personnelle ou la date de naissance d’un candidat pour évaluer ses compétences ?
Exemple concret : Une direction marketing souhaite utiliser une IA pour prédire le risque de « churn » (départ des clients). Pour cela, elle fournit à l’IA l’historique complet des transactions, les échanges avec le support client, les données de navigation sur le site et les informations personnelles des clients. A-t-elle obtenu un consentement explicite pour ce profilage automatisé à grande échelle ? La finalité est-elle compatible avec celle pour laquelle les données ont été initialement collectées ? Rien n’est moins sûr.
Comment maîtriser ce risque ?
- Cartographiez avant d’agir : Identifiez précisément quelles données personnelles seront utilisées par l’IA et pour quelle finalité exacte.
- Validez la base légale : Assurez-vous que vous disposez d’une base juridique solide pour ce nouveau traitement. Documentez votre analyse.
- Anonymisez à la source : La solution la plus robuste est de ne pas utiliser de données personnelles du tout. Des technologies d’anonymisation avancées, comme celle proposée par Datanaos, permettent de créer des jeux de données de test ou d’entraînement qui sont statistiquement réalistes et représentatifs de vos données réelles, mais entièrement anonymes. Vous pouvez ainsi développer, tester et affiner vos modèles d’IA sans jamais faire porter le risque sur des données personnelles réelles.
Risque 3 : Les « hallucinations » de l’IA et la violation du droit à l’exactitude
Les IA génératives, aussi impressionnantes soient-elles, peuvent « halluciner ». Ce terme désigne leur capacité à inventer des informations qui semblent plausibles mais sont en réalité fausses, car elles ne sont pas factuellement présentes dans les données sources.
Le problème concret : Si une IA est utilisée pour résumer le dossier d’un collaborateur, synthétiser un entretien de recrutement ou évaluer une performance, une hallucination peut avoir des conséquences graves. Elle peut attribuer à une personne des propos qu’elle n’a pas tenus ou des compétences qu’elle n’a pas, en positif comme en négatif. Cela contrevient directement au principe d’exactitude des données (Article 5.1.d du RGPD), qui stipule que les données personnelles doivent être « exactes et, si nécessaire, tenues à jour ».
Exemple concret : Un manager demande à une IA de lui faire une synthèse des cinq derniers entretiens annuels d’un salarié. L’IA, en « hallucinant », écrit que le salarié a été « identifié comme ayant des difficultés relationnelles avec son équipe », une affirmation qui n’a jamais figuré dans aucun compte-rendu. Cette information erronée pourrait injustement freiner sa carrière.
Comment maîtriser ce risque ?
- Instaurez une supervision humaine : La règle d’or est de ne jamais faire une confiance aveugle à l’IA pour des décisions impactant des individus. Tout résultat doit être validé par un humain compétent.
- Qualité des données en amont : Assurez-vous que les données fournies à l’IA sont propres, à jour et exactes. Le principe « Garbage In, Garbage Out » (des données médiocres en entrée donnent des résultats médiocres en sortie) s’applique plus que jamais.
- Informez et donnez un droit de recours : Soyez transparent avec les personnes concernées sur l’utilisation de l’IA et mettez en place une procédure simple leur permettant de demander une vérification et une correction des informations.
Risque 4 : La création de biais et de discriminations algorithmiques
Une IA est le reflet des données sur lesquelles elle a été entraînée. Si ces données contiennent des biais historiques, conscients ou inconscients, l’IA va non seulement les apprendre, mais aussi les systématiser et les amplifier.
Le problème concret : Le recrutement est un cas d’école. Si une IA est entraînée sur 20 ans de données de recrutement d’une entreprise qui, historiquement, a peu recruté de femmes à des postes techniques, l’algorithme risque d’en conclure que le genre masculin est un critère de performance pour ce type de poste. Il va alors systématiquement déclasser les CV de candidates, instaurant une discrimination à grande échelle, ce qui est illégal. La CNIL et le futur « AI Act » européen sont extrêmement vigilants sur ce point.
Exemple concret : Une IA d’évaluation de la performance est entraînée sur des données où les managers ont tendance à utiliser un vocabulaire plus « directif » pour évaluer les hommes et plus « collaboratif » pour les femmes. L’IA pourrait en déduire que le leadership est associé au vocabulaire directif et pénaliser les femmes dans ses évaluations de potentiel managérial.
Comment maîtriser ce risque ?
- Auditez vos données d’entraînement : Avant de lancer l’apprentissage, analysez vos jeux de données pour y déceler les biais potentiels (sur-représentation ou sous-représentation de certains groupes, corrélations fallacieuses, etc.).
- Créez des jeux de données équilibrés : C’est un cas d’usage majeur pour les solutions d’échantillonnage et de génération de données synthétiques. Datanaos peut vous aider à construire un jeu de données d’entraînement « idéal » : un échantillon parfaitement équilibré, où les biais historiques sont corrigés et les minorités correctement représentées. L’IA apprend ainsi à partir d’une base juste et non d’un passé imparfait.
- Testez et contrôlez en continu : Une fois le modèle déployé, testez régulièrement ses décisions sur des populations diverses pour vous assurer qu’aucun biais n’émerge avec le temps.
Risque 5 : Le manque de transparence de l’« IA boîte noire »
De nombreux modèles d’IA, notamment ceux basés sur le « deep learning », fonctionnent comme des « boîtes noires ». Ils sont si complexes qu’il est quasiment impossible d’expliquer de manière simple et intelligible pourquoi ils ont pris une décision spécifique.
Le problème concret : Cette opacité se heurte de plein fouet au principe de transparence et au droit à l’information des personnes (Articles 13, 14 et 15 du RGPD). Si une IA est impliquée dans une décision ayant un impact significatif sur une personne (un refus de prêt, un rejet de candidature, une proposition de licenciement), cette dernière a le droit de comprendre la logique qui a mené à cette décision. Répondre « c’est l’algorithme qui a décidé » n’est pas une réponse acceptable.
Votre IA a décidé. Mais pouvez-vous expliquer pourquoi ?
Exemple concret : Une IA analyse les candidatures pour un poste et écarte un profil. Le candidat, s’estimant qualifié, demande des explications. Si l’entreprise est incapable de fournir les critères précis et la logique qui ont conduit à ce rejet automatisé, elle est en défaut vis-à-vis du RGPD.
Comment maîtriser ce risque ?
- Favorisez l’IA explicable (XAI) : Lorsque c’est possible, préférez des modèles algorithmiques plus simples et interprétables. Pour les modèles complexes, utilisez des techniques de XAI (« Explainable AI ») qui aident à visualiser et à comprendre les facteurs les plus influents dans une décision.
- Documentez tout : Tenez un registre détaillé du système d’IA : la provenance des données d’entraînement, les paramètres du modèle, les tests effectués, les seuils de décision… C’est le cœur du principe d' »accountability » (responsabilité).
- Garantissez une voie de recours humaine : Offrez toujours la possibilité à une personne de contester une décision automatisée et de la faire réexaminer par un être humain.
L’IA, un levier de performance qui exige une gouvernance de la donnée
Le déploiement de l’IA en entreprise est avant tout un projet de gouvernance de la donnée. Chaque risque que nous avons exploré – conformité, sécurité, exactitude, équité et transparence – ramène à une question fondamentale : maîtrisez-vous les données que vous confiez ?
Maîtriser ces risques n’est pas seulement une obligation légale, c’est une condition pour bâtir une confiance durable avec vos clients, vos partenaires et vos collaborateurs. Avant de brancher vos données sur une IA, posez-vous les bonnes questions : sont-elles prêtes ? Sont-elles sécurisées ? Sont-elles représentatives ? Sont-elles anonymisées ?
Les collaborateurs sont-ils suffisamment sensibilisés et formés ?
Préparer vos données en amont devient essentiel. Des solutions comme Datanaos vous permettent de répondre à ces problématiques d’anonymisation, à travers des outils, des méthodes, des sensibilisations. Dans l’ère de l’intelligence artificielle, l’anonymisation n’est pas un frein à l’innovation ; elle en est un facilitateur.